Un silence d'or et une parole de diamant

Soumis par Hayan Sidaoui le mer 30/01/2019 - 19:19

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Faut-il encore présenter Sayyed Hassan Nasrallah ? Nous ne nous connaissons pas quoique nous sommes nés tous les deux la même année et avons grandi dans le même coin du Sud-Liban que j'ai habité de ma naissance en 1961 jusqu'en 1970.

On a sûrement les mêmes souvenirs d'enfance où notre cher Sud était livré à lui même, et au monstre israélien, délaissé aussi bien par le pouvoir libanais de l'époque que par les puissances mondiales, trop occupées par la gestion de Check point Charlie à Berlin où la guerre froide n'était froide que pour les laissés pour compte.

Des souvenirs commun à ce Saint-Homme au sens large du terme.
Des souvenirs où nous côtoyons la fatalité, celle qui consistait à nous familiariser avec les bombardements israéliens quotidiens.
Tout comme moi et bien d'autres enfants de ma génération, Nassrallah se réveillait le matin non pas avec le chant d'un coq mais avec le bruit sourd des bombes sionistes déversées sur les villages frontaliers avec la Palestine occupée où germait déjà la résistance de nos pères et de nos mères qui ne voyaient d'autres avenir pour nous que de résister par tous les moyens notamment par l'éducation dont ils s'évertuaient à nous offrir: "Israël est un mal qui doit disparaître et ne disparaîtera qu'en résistant peu importe le prix à payer".

Tout comme moi et tous les enfants du Sud, abandonnés aux exactions du sionisme criminel et inhumain, Nassrallah s'endormait chaque soir bercé par le même bruit sourd où le fer et le feu de la haine accompagnait nos rêveries de gamins et où, contrairement à la soumission, nous répétions tous en chœur dans les cours de récréation le slogan, de nos parents, en vogue à l'époque: "nous sommes tous des palestiniens", où à la même époque nos parents nous emmenaient manifester en soutien à Nasser après la douloureuse défaite de 1967.

Mon père, un anti-héros comme bien d'autres de sa génération qui ont assisté adolescents à la colonisation de la Palestine par des groupuscules terroristes des sionistes européens, m'a rappellé il y a quelques années une anecdote de mon enfance, j'avais 5 ans : "Alors que j'étais couché dans mon lit vers 20h, n'entendant pour une fois aucune explosion, je me lève vers 21h me dirigeant vers le séjour pour dire à mon père: "papa je n'arrive pas à dormir".
Nasrallah enfant a dû aussi connaître la même mésaventure en manque de sa "berceuse" habituelle.

La résistance n'est pas le caprice d'un jour, elle ne vient pas par enchantement, elle se forge à longueurs d'années. Comme pour un sportif de haut niveau elle necessite un entraînement quotidien, des sacrifices sur le long terme, un mental d'acier, une détermination sans faille maintenant la "forme" et la "ligne" et surtout s'habiller de justice et d'humanisme, car faire disparaître l'entité sioniste/talmudique est, comme je le dis souvent, une preuve d'amour pour toute l'humanité.

Pour nous autres enfants du Sud-Liban comme pour ceux de la chère et précieuse Palestine perpetuellement martyrisée depuis 70 ans il ne s'agit ni de haine ni de vengeance, nous ne sommes que des justes. Nous ne sommes pas et nous ne le serons jamais, malgré tout ce que nous avons subi, les enfants de la violence mais ceux de la paix, "la paix des braves" et Nasrallah en est le parfait symbole.

J'avais déjà traduit et commenté le discours charnière de Nasrallah lors de commémoration de la journée mondiale de Jérusalem en juin 2017 sous le titre "les sentiers lumineux ou la route vers Jérusalem" (http://www.hayansidaoui.net/Article15#).

Samedi dernier, Nasrallah après trois mois d'absence, via une interview accordée à la chaîne libanaise Al-Mayadeen, non seulement confirme son discours de juin 2017, où l'évolution de la guerre en Syrie par la suite lui a donné raison, mais lui donne encore plus de consistance et de relief, en plus d'une analyse pertinente et réaliste de la situation politique au Liban.

Avant de vous laisser prendre connaissance du contenu de l'interview, je termine avec ces deux citations du fondateur du PSNS (parti pansyrien qui revendique les frontières historiques de la Grande Syrie) et père de la laïcité levantine, emprisonné puis excécuté par le gouvernement libanais de l'époque inféodé à la France colonialiste, le journaliste et philosophe libanais Antoun Saadé (1904-1949):
"Qui n'a jamais rencontré la dignité ne sera jamais digne" et "n'ayez pas peur de la guerre mais de l'échec".
Deux hommes un laïc et athée et un autre dignitaire religieux avec le même discours, la même détermination et le même objectif, elle est bien là la force du Levant.

Je vous propose cette traduction qui m'a paru assez fidèle au contenu de l'interview:
http://www.tlaxcala.es/pp.asp?reference=1712&lg=fr