La vérité, entre rhétorique et bon sens

Soumis par Hayan Sidaoui le dim 01/07/2018 - 21:08

Rubrique

L’analyse géopolitique ou géostratégique est une discipline qui n’en est vraiment pas une, elle relève plus de l’essai politique et de l’interprétation propre à son auteur que d’une démarche scientifique.

Qui de tous ceux qui s’aventurent à ce périlleux exercice, moi le premier, seraient mis au parfum des secrets des « dieux » qui font la pluie et le beau temps sur notre planète ?

Certains expriment leurs interprétations des faits avec tellement d’assurance que nous avons l’impression qu’ils assistent personnellement à toutes les réunions des « grands » de ce monde !
Parfois même, on se demande si un Poutine ou un Trump, pour ne citer qu’eux, ne prennent aucune décision avant de les consulter ! Le ridicule de leurs plumes, aussi belles soit-elle, est parfois à la hauteur de leur méconnaissance qu’ils transforment à coup de rhétorique, bien rodée quoique sclérosée, en vérité sur laquelle les ignorants de tous bords viennent s’y agglutiner avec le sourire béant et les yeux émerveillés persuadés d’avoir appris quelque chose, ce qui ne va pas manquer de flatter l’égo des auteurs des « analyses lumineuses » offertes sur un plateau comme « un prêt à manger » dans un fast food !

Comme dis un dicton arabe : « un idiot qui tient un crayon est considéré comme un sage par les aveugles ».

Ces analystes, ou plus exactement ces « interpréteurs », se distinguent, pour l’écrasante majorité, par leur auto-emprisonnement dans une idéologie dont ils ont du mal à s’en défaire même si elle est totalement étrangère au sujet traité.
Au lieu de se servir, les cas échéant, de leur idéologie pour tenter, autant se peut, d’avoir une approche logique de tel ou tel événement ils s’évertuent de mettre le même événement, auquel ils sont étrangers et quelle que soit sa gravité, au service de leur idéologie tellement l’endoctrinement sclérose leur intellect.

Dès lors, bien évidemment, les principaux concernés par l’événement « analysé » se considèrent comme méprisés ou bien, pour le moins, ignorés quant à leur propre approche d’un fait qui les concerne directement et en premier lieu.

L’objet de cet article, contrairement à mon habitude, n’est pas de critiquer telle ou telle plume autant que conseiller ou plus modestement attirer l’attention de certaines plumes, prises joyeusement par leur élan, sur les pièges que recèle l’exercice de juger des problèmes des autres !

Ibn khaldoun (1332-1406) le père de la sociologie moderne disait avec justesse : « La méthode choisie pour traiter d’un sujet donné est plus importante que le sujet lui-même ». Dans le sens où une mauvaise méthodologie fausse la problématique et par conséquent dénature le sujet traité.
Il dit aussi : » méfiez-vous des rapporteurs qui ne vous rapporte que l’événement tout en occultant les causes et les circonstances ».

Or, beaucoup des « analystes-interpréteurs » se contentent hâtivement, et de loin, d’émettre un avis sur un événement donné tout en ignorant les détails qui font l’événement et qui présagent ou pas de ses causes comme de ses conséquences.

Je prends le traitement de la guerre en Syrie comme exemple concret.

Comment peut-on avancer des théories sur la guerre en Syrie sans connaître son histoire ou encore, et c’est pire, sans connaître les détails de ce qui se produit sur le terrain ?! Comment peut-on juger de ce que pensent les Syriens et leurs représentants sans prendre la peine de tendre l’oreille à leurs échos et même pour certains sans avoir jamais mis les pieds en Syrie ?!

Le comble étant de juger de cette guerre via la lorgnette partisane d’un tel ou tel parti politique qui, ni de loin ou de près, a ou pourrait avoir un quelconque lien avec la dite guerre où l’idéologie, locale comme internationaliste, prime sur le bon sens qui consiste à, pour le moins, tenir compte de ce que disent les Syriens eux-mêmes ! Ces « analystes-interpréteurs » qui ignorent tout de la situation militaire, des déclarations des députés et ministres Syriens, qui n’entendent des discours d’Assad ou de Nasrallah et même de Poutine que ce qui les arrange et qui les conforte dans leur cage idéologique !

Les plus ridicules étant ceux qui attachent plus d’importance à ce que disent un Trump ou un Netanyahu comme si, inconsciemment ou pas, appréhende l’idée que les arabes peuvent gagner une guerre féroce contre la presque totalité du reste du monde ! Comme si, de part leur culture occidentale, Israël ne pourrait qu’être invaincu et immortel !

Ce dédain, volontaire ou involontaire, rajouté à l’ignorance des détails où se niche le diable, rend leurs interprétations bancales, démagogiques, au meilleur des cas maladroites et participant de la sorte à la propagande sioniste en induisant les lecteurs, « bienheureux » d’applaudir, en erreur !

Comment peut-on se proclamer pro-syrien ou pro-palestinien en accordant la fiabilité aux médias israélo-occidentaux tout en prenant soin d’ignorer ceux du Levant qui pourtant ont fait preuve d’objectivité depuis 7 ans !

Plutôt que de s’abandonner aux interprétations hasardeuses ou partisanes en s’appuyant sur des données arbitraires n’est-il pas plus judicieux d’opter pour le principe de déduction en faisant l’effort de mieux connaître le lieu où se déroulent les événements, connaître son histoire comme son présent, prendre la peine d’éplucher les détails aussi fastidieuse que cette tâche puisse paraître et surtout écouter un minimum ce que disent les principaux concernés ?

Quel serait le but pour un étranger qui se pencherait sur une problématique concernant un pays ou un peuple donné ? N’est-ce pas le souci de dire la vérité motivée par un souci de justice ? Dès lors, pour juger ne faut-il pas d’abord être dépourvu de tout conditionnement politique préalable ?

Je précise que ceux dont je parle dans cet article ne sont pas nos ennemis mais bel et bien nos soutiens assidus et sans doute de bonne foi mais dont la justesse de leur approche et de leur méthodologie laisse à désirer et qui de ce fait participe à la confusion naturellement voulue par nos ennemis, d’autant plus voulu qu’ils perdent pied.

Pour déduire, au lieu d’interpréter, faut d’abord s’armer de bon sens en laissant de côté toute rhétorique pré formatée pour ne pas dire toute dialectique. S’attarder à l’essentiel autrement dit séparer ce que nous sommes de ce que nous jugeons tout en liant les effets aux causes et les causes aux mobiles originels des uns comme des autres.

Nous autres principaux concernés nous connaissons parfaitement la vérité si tentés de donner à ce terme une définition précise et immuable puisque, cela va de soi, à chacun sa vérité, à chacun son regard et à chacun son intérêt. Mais, n’est-il pas logique que la vérité de ces mêmes principaux concernés priment, à défaut être mise en valeur par souci de justice justement ?

Chacun voit la vérité, ou la lumière au fond de la grotte, selon Platon, en fonction de ce qu’il est comme il l’a si bien démontré dans la « République ».
Or, la vérité que nous autres levantins voyons est celle de nos propres ombres que la lumière projette au fond notre propre grotte, celle qui de toute évidence vous est étrangère tout comme nos propres souffrances, est-ce vraiment si difficile de le comprendre ?

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